Le Rail et la roulette russe de la formation professionnelle privée

Dans des discussions ici ou là, La canaille a entendu parfois des interrogations sur l'opposition à voir conduire des trains par des agents non formés par la SNCF : "si ils ont le permis pourquoi s'y opposer ?"

Question à deux volets. L'un celui de la fin du monopole public et les positions des syndicats de la SNCF pour la défense de l'unicité du service public sont suffisamment connus pour ne pas y revenir ici. Le second plus technique doutant de l'argument des enjeux de sécurité développés par les cheminots.

Donc allons jeter un œil. La Tribune des cheminots, le journal de la fédération cgt des Cheminots qui si certes elle est bien lue dans la profession ne transpire pas suffisamment au-delà. Elle apporte ce mois ci un éclairage très fort sur la question.

Il faut savoir que la formation d'un conducteur de train est toujours sévèrement encadrée. La direction de la SNCF ne cesse de tirer vers le bas pour économiser sur la formation et la qualification de tous les cheminots qu'elle est contrainte de reconnaitre et …de  (mal)rémunérer. Le maintien d'une qualité de cette formation dont la présence des élus du personnel pour la surveiller (c'est une très bonne chose) est encore présente même si d'importantes améliorations sont à apporter et mes camarades s'y emploient. Ce qui suit est aussi stupéfiant qu'éclairant.

ECR, une filiale de la DeutschesBahn (qui à ce titre, grâce aux directives et traités de l'UE, a accès au réseau français), propose une formation de conducteur que pour rester polie nous qualifierons ici d'exotique.

Jugez-en :

ECR à choisi une agence de placement de main d'œuvre un genre "Manpower et successeurs", "EURORAIL job" (le titre mesure l'ambition), qui propose une formation de conducteur non rémunérée ou le postulant signe une convention d'accueil de 9 mois dont deux mois d'auditeur libre non rémunéré. Un éventuel contrat étant comme un miroir aux alouettes présenté comme possible pour les sept mois restant.

Au bout des deux mois, le stagiaire est avisé que le contrat de professionnalisation n'étant pas réalisable il peut prétendre à un hypothétique CDD à 750€ par mois congés payés et primes diverses incluses pour 35h00 hebdo. Soit moins de 5€ de l'heure sur la base de 4 semaines ½ par mois, ½ smic !! Non vous ne rêvez pas, vous avez bien lu.

Alors que par définition le métier est fait de déplacement, ceux-ci (hébergement et repas) sont aux frais du stagiaire. Il doit de plus déclarer qu'il est bénéficiaire d'une assurance responsabilité civile et d'une couverture sociale maladie. Traduction il n'y a pas de garantie en cas d'accident de travail, victime ou auteur. 

Avec tout cela, nos joyeux philanthropes s'engagent à amener le ou la candidat(e) (c'est La Canaille qui peut être abusivement assure ici la féminisation) dans ces conditions là, jusqu'à un examen qu'il (elle) a intérêt à ne pas rater sous peine de rembourser 15 000 €uros, (soit 20 mois de rémunération).

Bien sur les cheminots CGT dénoncent ces pratiques. Ne croyez vous pas cela justifie que les usagers aussi se mobilisent pour un service public unique intégré et unifié de la SNCF et les garanties statutaires des personnels pour assurer qualité et sécurité ?  

 Lors des prochaines luttes pour l'emploi les salaires, la défense du statut, donnez donc cela à connaitre.

A ceux qui pourraient être séduit proposez l'extension du système aux pilotes de ligne, aux installateurs d'ascenseurs, aux sages femmes ou aux agents du SAMU, au prof pour leurs enfants ou aux pharmaciens.

Et qu'en penserons alors vos interlocuteurs.

Cela renvoi au débat engagé ici les jours précédents sur le service public ses critères et son organisation.